Compte-rendu de la Jean-François Bernard 2007 !


Salut les amis !


Donc, voici mon premier CR … de ma première cyclosportive de l’année la « Jean-François Bernard » .


Je suis dans Plainefas que j’ai pris en pleine « gue… », dans la roue d’un concurrent chevauchant un Colnago C50 de toute beauté.

Comme ça fait un moment que je suce, j’exerce un effort physique et mental et je me hisse difficilement à sa hauteur, histoire de lui montrer que je souhaite partager l’effort pénible qui nous accable tous et me comporter en cyclosportif responsable, respectueux de l’étique.

Mon Look 261 me rappelle son poids, bien supérieur au C50 voisin. Nos accompagnateurs s’éparpillent qui devant, qui derrière.

Soudain des craquements de chaîne et dérailleurs mal huilés nous sortent de notre torpeur musculaire et là, un vrai, un gugusse, un arcandier (comme disait mon directeur sportif quand j’étais jeune) nous dépasse par la gauche, tous mollets et poils dehors, socquettes Moreau sous le genou, courroies de cale-pieds en bataille, pied gauche en forte pronation, roues à grande flasques, manettes de dérailleur rouillées au cadre, ( il les manipule sous mes yeux et ceux du cavalier italien), enclenche le 42x19 au plus fort de la pente, la TOTALE, nous dépose en deux temps trois tours de pédale, disparaît trois lacets plus haut.

Je lâche penaud à mon voisin : « lui, y m’éclate », (je n’ai pas le souffle de préciser au sens propre comme au figuré, concentré sur mon pédalage déconfit). Le colnagoïste*, tout aussi dépité, me précise vouloir vendre son destrier noir, au plus offrant dès la ligne d’arrivée franchie.

Sciés, nous sommes sciés.

Nous sauvons notre honneur dans un « le moine ne fait pas l’habit ou son contraire je ne sais plus ». La honte s’abat sur nous. Pourquoi, mon Dieu, pourquoi, n’avons-nous pas la santé de l’individu qui vient de nous déposer, de nous coller au bitume pour longtemps, pour toujours peut-être, alors que nous avons de vrais vélos par des « chauffage central », alors que mon collègue a un beau maillot noir anthracite en harmonie avec le carbone de ses tubes et moi mon Forum velo101 blanc complémentarité même d’un Look traditionnel. Dieu n’existe pas maintenant j’en suis sûr.

Un vent glacial se lève, les nuages s’amoncèlent, nous entrons dans la nuit, la prise de conscience immédiate : il nous faudra nous entraîner davantage, perdre du poids, contrôler la bouffe dès demain pour préparer notre prochaine rencontre avec notre coureur à la mie de pain en espérant qu’il ne s’achète jamais un C50 ou un 595 parce que là on est tous morts même vous les potes, les Laurent, les Karl, les Raphaël, tous foutus.
Avant cet épisode, au départ, j’avais pris la peine de m’échauffer (15 km) pour parer au pire de la première bosse à Pazy mais je compris vite que la reprise étais difficile et que 1500 km, 4 kg perdus en 40 jours 56 ans ne pouvaient remplacer une saison d’entrainement même pour 100 bornes. Après Pazy, je pris le temps de profiter des lumières que nous proposait le soleil nivernais dans les vapeurs matinales.

Au pied du barrage de Pannecières, je dépannai de mon gonfleur, un cyclo hurlant d’une pompe cassée.

Dans l’ascension d’ Ouroux une sorte de Museew grimpeur me passât en m’encourageant. A Lormes, ma femme me tendit une bouteille de flotte de 75 cl, comme j’attaquais le profil descendant vers l’arrivée, un peu de poids en plus… si vous voyez ce que je veux dire (c’est ce que l’on appelle du dopage à l’eau claire).

Comme je connaissais bien les 20 derniers kilos, je me suis permis de jouer avec le concurrent qui me précédais pour le passer au plus fort de la bosse de Coulon et balayer d’un revers de main, un petit malin qui tentait de revenir, car le faux plat en force, c’est ma spécialité, j’ai pas été un firmin pendant dix ans pour rien BORDEL !!!


Bilan de l’épreuve 106 km à 28,47 km/h, c’est marqué sur le diplôme : plôme.


Plus sérieusement, ce fût pour moi l’occasion de rencontrer des potes du Forum dont je ne connaissais que le nom et là, un vrai moment d’émotion pour moi quand je pointai discrètement Karl du doigt à ma femme (30 ans de bonheur) qui m’accompagne toujours dans les galères cyclistes ou pas cyclistes (celle pas cyclistes sont plus nombreuses).
Pas difficile de reconnaître Karl, je savais qu’il avait un maillot de Chartres pour avoir expliquer plein de choses censées sur le forum. Monsieur Koudre, me présenta Raphaël, un personnage réservé et plein de détermination dans un regard passionné quand il explique son cyclosport et puis Laurent, au bout de son effort, marqué par une course qu’il dit avoir mal géré. J’ai vu les gars du 77 porteur d’un maillot que j’ai moi-même porté pendant 20 ans, toujours avec fierté et conviction, en est-il de même pour eux, ou sont-ils des mercenaires cyclistes comme ils y en a trop, savent-ils que ce maillot dans les années soixante-dix quatre-vingt était craint de tous sur une ligne de départ, savent-ils que pour les gamins que nous étions dans ces années-là, mômes de la rue, de la misère humaine, ce maillot fit de nous des hommes responsables et structurés, savent-ils que pendant dix ans, ce maillot, c’était soixante victoires par an pour une dizaine de coursiers, savent-ils que ce maillot nous sauva de la délinquance qui nous guettait et qu’aujourd’hui, nous sommes encore un brelan d’as à nous retrouver avec chaleur et simplicité dès que possible.


Très directement, j’ai préféré mes Karl souriant, mes Laurent pâle, mes Raphaël radieux, mes nouveaux potes, discrets, moi qui ai ma carrière cycliste derrière moi, je vais suivre leurs résultats, je vais m’émouvoir, je vais continuer à faire du vélo.


Excusez-moi les gars pour ce CR un peu long mais je suis un émotif, le vélo, c’est ma vie dans ma tête.


Philippe B.

*colnagoïste : coureur qui ne prête jamais son vélo.




2 commentaires:

Élisa a dit…

Le compte-rendu qui l'a rendu célèbre ! Bisous !

Maison La Martiennerie a dit…

Le CR de folie ! Enorme, on sent déjà ce que sera la plume des futurs CR, du grand, du beau, du bon que dis-je de l'Art. Le seigneur en connaît un rayon, quand ça roule, y sait de quoi il en retourne, lui qui ne se retourne jamais dans l'effort justement...